Points de vue sur l'actualité

Lettre ouverte à Jean-Pierre Raffarin

"Monsieur le Premier Ministre,

Le 25 mai dernier sur le plateau de TF1, François Fillon, Ministre des Affaires Sociales, du Travail et de la Solidarité, a déclaré que le débat sur les retraites était "maintenant un débat politique" qui "naturellement" doit "avoir lieu" au Parlement. Dont acte ! C'est pourquoi la CFTC a décidé de poursuivre son action en déposant plusieurs amendements, auprès des parlementaires, pour rendre le projet de loi plus juste et plus solidaire. Vous les trouverez joints au présent courrier. Car ce qui apparaît surtout dans cette réforme des retraites, c'est l'injustice de certaines mesures. Cessons de parler de pourcentages, parlons en espèces sonnantes et trébuchantes. Est-il juste pour un salarié, qui a travaillé toute sa vie au Smic, de se retrouver avec une pension de 575 euros par mois ? Est-il possible de vivre avec 575 euros ? L'un de nos interlocuteurs patronaux nous a répondu : "Non, ce n'est pas possible. Mais on ne peut pas faire autrement." Cette réponse, vous vous en doutez, ne peut que révolter les syndicalistes et les salariés. Nous sommes persuadés que vous ne vous inscrivez pas dans cette logique.
Est-il juste aussi qu'une femme ayant eu une carrière discontinue, parce qu'elle a élevé trois enfants ou plus, ne puisse pas prétendre à une retraite décente à taux plein ? Pour quelle faute est-elle pénalisée ?
Est-il juste, dans le contexte actuel, de demander aux salariés de travailler jusqu'à 65 ans sans prendre en compte la pénibilité de leur métier ni avoir l'assurance que les entreprises leur garantiront un emploi jusqu'à l'âge de la retraite ? Le patronat acceptera-t-il de maintenir en activité les seniors ? Sinon, sera-t-il juste d'augmenter les cotisations chômage pour payer cette réforme des retraites ?
Est-il juste enfin de désigner les fonctionnaires comme les responsables d'un échec de cette réforme alors que, dans le même temps, ils doivent supporter des suppressions de postes, des restrictions budgétaires, un redéploiement, la décentralisation, la remise en cause de leur statut, sans perspective d'avenir pour la Fonction Publique ? Est-il juste de faire supporter aux seuls salariés le financement de cette réforme sans chercher, dès à présent, à élargir l'assiette des cotisations ? Est-il acceptable de voir certains gagner leur vie en spéculant sans participer à la cause nationale des retraites ?

Vous le voyez bien, Monsieur le Premier Ministre, votre texte souffre de nombreuses insuffisances. Voilà pourquoi nos propositions d'amendements doivent être soutenues, afin d'aboutir à une réforme qui prenne en compte les aspirations d'un maximum de salariés."

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