Points de vue sur l'actualitéRelation salarié / employeur : assurer sa défense, c'est sacréProduire des documents de l'entreprise pour assurer sa défense est permis, mais à certaines conditions (Cass, crim., 16 juin 2011, n°10-85079). En l'espèce, le directeur général d'une société est informé de l'intention de son employeur de le licencier pour ses résultats insuffisants. Afin de préparer sa défense, le salarié transfère sur sa messagerie personnelle divers documents de l'entreprise prouvant que la cause réelle de son éviction est, en réalité, la détérioration des résultats de l'entreprise. La lettre de licenciement qui lui est adressée par la suite mentionne effectivement son " activité quantitativement insuffisante ". L'employeur, à la suite de ce transfert de documents, porte plainte pour vol et abus de confiance. Mais le juge d'instruction rend une ordonnance de non-lieu confirmée par la chambre de l'instruction. Il se pourvoit alors en cassation, car selon lui, si le salarié a le droit d'utiliser des documents de l'entreprise, c'est uniquement pour assurer sa défense dans le cadre d'un procès prud'homal. Or, au moment du transfert des données, aucune procédure de licenciement n'était engagée, et par conséquent aucune action n'était en cours devant le Conseil de prud'hommes. Mais la Cour de cassation rejette le pourvoi au motif qu'il suffit que la procédure prud'homale ait été engagée peu après le transfert des documents. Pour la Haute Cour, le salarié est en droit d'utiliser des documents appartenant à l'entreprise dès l'instant où celui-ci est informé que l'employeur a le projet de le licencier. Deux conditions sont toutefois requises : le salarié doit avoir obtenu ces documents dans l'exercice de ses fonctions et leur production doit uniquement servir à sa défense dans la procédure prud'homale. Ainsi, pour la Cour de cassation, la nécessité pour le salarié d'établir sa défense prime sur les poursuites pénales de vol ou d'abus de confiance auquel le salarié pourrait s'exposer. Notre analyse : la chambre sociale et la chambre criminelle avaient déjà admis la production de ces documents comme moyen de preuve recevable depuis 2004 dans le cas d'un procès prud'homal en cours. Ce qui est nouveau avec cet arrêt, c'est que dorénavant il suffit que le procès ait été "engagé peu après" le transfert des documents. |