Points de vue sur l'actualité

Harcèlement moral : responsabilité en cascade

L'employeur est responsable du harcèlement moral subi par un de ses salariés, même s'il n'est pas directement exercé par lui, selon la Cour de cassation (n°09-69616 du 1er mars 2001). En l'espèce, une salariée est engagée par une société en tant que responsable d'un restaurant exploité par le représentant d'un franchiseur. Bien que sans lien hiérarchique avec elle, ce dernier est mandaté pour mettre en place de nouveaux outils de gestion. Il reproche verbalement à la salariée son absence de management, ses mauvais résultats commerciaux et la met à l'écart, lui faisant savoir qu'il ne veut plus d'elle comme collaboratrice. La salariée, en arrêt maladie, est finalement licenciée pour insuffisance professionnelle. Elle saisit les prud'hommes pour contester ce licenciement et faire reconnaître le harcèlement moral dont elle estime avoir été victime. La Cour d'appel la déboute au motif, d'une part, que " le harcèlement ne peut résulter de contraintes de gestion ni du pouvoir d'organisation et de direction de l'employeur " ; et d'autre part, que " l'auteur du harcèlement n'étant pas un salarié de sa société, il ne pouvait donc être mis en cause ". Mais la Cour de cassation casse l'arrêt et donne raison à la salariée. L'absence de faute de la part de l'employeur "qui est tenu envers ses salariés d'une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs " - notamment en matière de harcèlement moral - " ne peut l'exonérer de sa responsabilité ". Selon la Cour " il doit également répondre des personnes qui exercent, de fait ou de droit, une autorité sur ses salariés. " Ce tiers, chargé par l'employeur de mettre en place de nouveaux outils de gestion, devait former la responsable du restaurant et exerçait donc une autorité de fait sur elle.

À noter : lors de la négociation de l'ANI sur le harcèlement et la violence au travail du 26 mars 2010, la CFTC avait posé le principe de " responsabilité en cascade " ou " chaîne de responsabilité " quels que soient les auteurs d'actes de harcèlement, personnes physiques ou morales (entreprises, dirigeants, mandataires sociaux, intervenants extérieurs...). Principe retenu par la Cour de cassation dans son arrêt.