Points de vue sur l'actualitéRetraites : un débat confisquéNous pensons qu’il est encore possible de sortir de l’actuel conflit par le haut. Le débat sur les retraites est en train de prendre une nouvelle tournure. Depuis le début, le gouvernement a voulu présenter sa réforme comme un dossier technique, pour ne pas ouvrir une concertation qui aurait donné la parole aux représentants des salariés qui par nature, pense-t-il, sont incapables de comprendre ce qui est bon pour le pays. Seuls les experts peuvent le savoir. Le débat a donc été confisqué par des spécialistes et les syndicats, écartés. Aujourd’hui, alors que la mobilisation ne faiblit pas, que les jeunes rejoignent le mouvement, que le gouvernement prend conscience du caractère injuste de son projet pour les femmes et les familles défavorisées (suffisamment en tout cas pour faire adopter en toute hâte des amendements qui atténueront les conséquences d’une cessation tardive d’activité), on commence à s’apercevoir que la retraite est un sujet éminemment politique qui possède une composante comptable, certes, mais aussi et surtout des dimensions économique, sociale et sociétale qui engagent l’avenir de notre pays. Quelle société voulons-nous pour demain ? C’est aux réponses que nous apporterons à cette question que nous serons jugés. La logique voudrait donc qu’on décide d’un moratoire et qu’on établisse les conditions d’une véritable concertation tripartite. À la CFTC, c’est ce que nous répétons depuis le début. La réforme des retraites n’est urgente que pour les marchés financiers et les agences de notation qui cherchent à imposer leur loi au nom de principes économiques qui ont montré leur limite avec la crise. Bien que, par son intransigeance et sa rigidité, le gouvernement n’ait fait qu’imposer un rapport de force, nous pensons qu’il est encore possible de sortir de l’actuel conflit par le haut. Tant qu’un espoir de réouverture du dialogue, aussi mince soit-il, existera, nous n’appellerons pas à la grève reconductible : nous aurions tous beaucoup à perdre à nous lancer dans un conflit long à l’issue plus qu’incertaine. |