Points de vue sur l'actualitéDiscrimination : (comment) en établir la preuveUne discrimination peut être constatée en l’absence d’élément comparatif. C’est en substance ce que dit la Cour de cassation dans un récent arrêt (10/11/09, n°07-42.849). Dans cette affaire, une salariée dénonce une discrimination dans l’évolution de sa carrière à compter de l’année où précisément elle a participé à une grève. Les juges d’appel lui reprochent de ne pas fournir “le moindre élément de comparaison avec d’autres collègues de statut identique” pour la débouter de sa demande de dommages et intérêts. La Cour de cassation casse l’arrêt rendu : “Attendu que l’existence d’une discrimination n’implique pas nécessairement une comparaison avec la situation d’autres salariés (…) qu’en se déterminant comme elle l’a fait, sans rechercher si le ralentissement de la carrière de la salariée et les difficultés auxquelles elle a été confrontée, dès après sa participation à un mouvement de grève, ne laissaient pas supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte, la Cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision” (10/11/09, n°07-42.849). L’article L. 1132-1 du Code du travail sur le principe de non-discrimination renvoie à l’art.1 de la loi du 27 mai 2008 qui prévoit pourtant que “constitue une discrimination directe la situation dans laquelle, sur le fondement de son (sa non) appartenance à une race, religion, âge, handicap… une personne est traitée de manière moins favorable qu’une autre ne l’est dans une situation comparable”. La Haute Cour va donc plus loin que la loi en décidant qu’une discrimination peut néanmoins être constatée en l’absence d’élément comparatif. Dans son rapport annuel d’activité, elle avait déjà annoncé en 2008 que “si la preuve d’un traitement inégalitaire est nécessairement une preuve par comparaison, la preuve directe de la discrimination est possible chaque fois qu’une mesure défavorable peut être établie en soi” (cf. encadré). L’article L. 1134-1, sur la charge de la preuve, prévoit qu’en cas de litige, la preuve ne pèse pas sur le salarié qui doit seulement présenter des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination et qu’au vu de ces éléments, il incombe à la partie adverse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. Et le juge forme ensuite sa conviction. Inégalité de traitement vs discrimination : lorsque la différence contestée est fondée sur l’un des motifs cités à l’art. L. 1132-1 (origine, sexe, âge, handicap, activités syndicales...), il s’agit de discrimination. Lorsqu’elle est fondée sur un autre motif (salaire, nature du contrat, catégorie professionnelle…), c’est une inégalité de traitement. |