Points de vue sur l'actualité

Ce travail qui tue

Tout ce qui contribuait à la dignité de la personne est ainsi nié et le travail bien fait, remplacé par le travail peu cher.

La souffrance au travail est telle, aujourd'hui, qu'il ne se passe pas un jour sans que la presse ne lui consacre un, voire plusieurs articles. Je veux, ici, parler de la souffrance mentale, dont les suicides très médiatisés qui ont frappé France Télécom dernièrement, mais qui touchaient de la même manière Renault Guyancourt, hier, et de nombreuses autres entreprises ou secteurs d'activité, comme la police, ne sont que la partie immergée de l'iceberg. Pendant des années, en effet, de nombreux salariés sont morts d'épuisement au travail, sans que personne, jamais, n'en parle. Le stress est devenu, petit à petit, une méthode de management. Les dépressions se multiplient. J'aurais donc tendance à penser qu'une telle prise de conscience de ce qui est devenu un véritable fléau pour notre société, est plutôt positive, montrant que le travail de sensibilisation et d'alerte réalisé par les syndicalistes dans les entreprises commence à trouver des oreilles attentives. Malheureusement nous constatons le phénomène depuis une quinzaine d'années et nous en sommes toujours à dresser le diagnostic, mais pas encore à en identifier les causes et à chercher des solutions. Or, les chercheurs – Christophe Dejours en tête – sont de plus en plus nombreux à estimer que la cause première de telles dérives se trouve dans l'évaluation individuelle des performances introduites par des gestionnaires guidés par un seul principe : réduire les coûts et améliorer les résultats, au détriment du travail et de la personne qui le réalise. Rien d'étonnant, dès lors, à ce que les réorganisations succèdent aux réorganisations, à ce que la production soit délocalisée ou sous-traitée, les seniors et les jeunes écartés du monde du travail. Tout ce qui contribuait à la dignité de la personne est ainsi nié et le travail bien fait, remplacé par le travail peu cher. Les syndicalistes ont un rôle de premier plan à jouer pour lutter contre ce phénomène. Et plus particulièrement ceux de la CFTC, dont les valeurs sont directement mises en œuvre dans cette mobilisation.