Points de vue sur l'actualité

Temps d'habillage : retournement de veste

La Cour de cassation a opéré un revirement de jurisprudence en matière de droit des salariés astreints au port de tenues au travail (Cass.soc. du 26 mars 2008 n°05-41.476). Des contreparties – liées à cette astreinte et prévues par le Code du travail – moins avantageuses pour les salariés sont désormais prévues. L'article L. 3121-3 du Code du travail prévoit, en effet, la détermination de contreparties aux temps d'habillage et de déshabillage, sous forme de repos ou sous forme financière – celles-ci étant prévues par convention ou accord collectif ou, à défaut, par le contrat de travail. Le bénéfice de ces contreparties est subordonné à deux conditions : le caractère obligatoire du port d'une tenue de travail (pour des raisons de sécurité ou liées à l'hygiène, par exemple), et le fait que l'habillage ou le déshabillage doivent être réalisés sur le lieu de travail. La Cour de cassation s'est d'abord contentée, dans un arrêt du 26 janvier 2005 (n°03-15-033), d'interpréter de manière très souple l'article du Code et donc de manière très avantageuse pour les salariés astreints au port de tenue de travail (cf. notre article dans la LC n° 1077). La Haute Cour prenant en compte seulement la première condition : “ lorsque le port d'une tenue de travail est obligatoire, l'habillage et le déshabillage doivent être réalisés dans l'entreprise ou sur le lieu de travail ”. C'est la contrainte que représente en temps, le fait de vêtir ou de dévêtir une tenue obligatoire qui justifie l'octroi de contreparties. Peu importe où cette opération d'habillage et de déshabillage a lieu, des compensations doivent être dues par l'employeur. Dans un arrêt du 26 mars 2008, la Haute Cour revient sur son interprétation du Code qui était à l'avantage du salarié. Elle subordonne désormais le bénéfice de ces contreparties à la réalisation des deux conditions cumulatives prévues par le Code du travail : port obligatoire d'une tenue de travail et ordre de procéder aux opérations d'habillage et de déshabillage à l'intérieur de l'entreprise. Elle procède ainsi à une lecture beaucoup moins libérale dudit article, mais beaucoup moins avantageuse pour les salariés. En effet, dès lors que l'employeur renvoie ces opérations d'habillage et de déshabillage dans la sphère privée, aucune compensation n'est due aux salariés. Lesquels ne pourront plus être indemnisés, ce qui peut constituer un préjudice : être ainsi obligés d'afficher leur appartenance à l'entreprise, en devant porter leur tenue de travail dans les transports en commun par exemple… Les négociateurs devront dorénavant être vigilants dans la négociation de ces contreparties.