Points de vue sur l'actualitéGrenelle de l'environnementCourant octobre, des consultations vont être organisées dans les régions (voir ci-dessous la liste et les dates). Il importe que les militants CFTC y fassent entendre leurs revendications en matière de développement durable et d'environnement. Pour vous aider, nous vous proposons, une note de cadrage validée par le dernier Conseil confédéral et un certain nombre de pistes (non exhaustives) des propositions portées par la CFTC dans les six groupes de travail qui ont travaillé une partie de l'été. Mais d'abord un petit rappel des faits. Conformément aux engagements pris pendant la campagne présidentielle, Nicolas Sarkozy a confié à son ministre chargé de l'Ecologie (d'abord Alain Juppé, puis Jean-Louis Borloo) la tâche d'organiser un « Grenelle » de l'environnement, fin octobre. Des travaux en six ateliers ont démarré début juillet autour de six thèmes : 1 - Lutter contre les changements climatiques et maîtriser l'énergie,
Les groupes de travail sont composés de quarante membres répartis en cinq collèges. Ces collèges ont pour vocation de représenter les acteurs du développement durable : l'Etat, les collectivités locales, les ONG, les employeurs et les salariés. Ont participé à ces groupes pour la CFTC : 1 – Jean-Marie Parant,
Bernard Ibal et Pierre-Jean Coulon étant les pilotes politiques du dossier. Voici les principales propositions des six groupes de travail et des deux ateliers intergroupes (OGM et déchets) du Grenelle de l'environnement, remises à Jean-Louis Borloo le 27 septembre : TRANSPORTSIl s'agit de ramener les émissions de gaz à effet de serre (GES) du secteur transport (de l'ordre de 25 % des émissions françaises, soit une augmentation de 22% depuis 1990) à leur niveau 1990 d'ici 15 ans. - réduction de vitesse immédiate de 10 km/h sur routes et autoroutes
BATIMENTLe bâtiment, premier consommateur d'énergie, doit opérer une « rupture technologique » dés 2008 en : - étendant l'étiquetage énergétique à tous les appareils de grande consommation (téléviseurs, ordinateurs...),
ENERGIE- Une contribution climat énergie taxerait les produits dont le contenu en carbone ou en énergie est élevé (carburants...) mais l'assiette de cette « taxe carbone » ne fait pas consensus.
NATURE ET BIODIVERSITE- Une « trame verte » (un réseau écologique national) relierait les parcs naturels et autres espaces protégés
SANTE- Intégrer au prochain plan santé-environnement (2008) des objectifs pour les substances nocives : benzène, mercure, trichloréthylène ...
AGRICULTURE- multiplier par 3 les surfaces en agriculture biologique (6% de la surface en 2010), et par dix en 2020.
OGM- pas d'accord sur un éventuel moratoire en attendant l'adoption d'une loi - renforcer la recherche publique, créer une Haute autorité, adopter avant la fin du printemps 2008 une loi traitant des OGM et permettant le libre choix du consommateur et du producteur. DEMOCRATIE ECOLOGIQUE- reconnaître les partenaires environnementaux au même titre que les partenaires sociaux
DECHETS- réduire les quantités de déchets produites de 5 kg par habitant et par an (sur 500 kg/habitant/an) sur 5 ans
Tout au long du mois d'octobre des consultations vont être organisées dans les régions :
Les unions locales, départementales et régionales de la CFTC sont invitées, dans la mesure de leurs possibilités, à s'exprimer, notamment pour porter des propositions des participants CFTC aux groupes de travail qui n'ont pas été retenues. Il faut également savoir qu'une consultation du grand public est organisée par internet (voir le site du ministère : http://www.legrenelle-environnement.fr). Le « Grenelle » à proprement parler se tiendra fin octobre ; il prendra la forme d'une table ronde. « Il examinera les propositions des groupes de travail et sera enrichie par l'ensemble des contributions, précise le ministère (…) A l'issue des discussions, les différents collèges prendront des engagements, chacun pour ce qui les concerne, et solliciteront l'arbitrage de l'Etat lorsque celui-ci sera nécessaire. La table ronde se conclura par un plan national pour l'environnement, qui sera mis en œuvre après avoir été soumis au président de la République. Les propositions retenues donneront lieu à des chantiers définis à partir d'objectifs précis ». Cette table ronde sera donc le début et la fin d'un processus qui pourrait durer jusqu'à février 2008. Jean-Louis Borloo a reçu les représentants des organisations syndicales le 21 septembre, et son cabinet devrait les recevoir une nouvelle fois le 2 octobre. C'est Bernard Ibal qui y représente la CFTC. La CFTC et le développement durableIl convient tout d'abord de rappeler l'importance qu'accorde la CFTC à la notion de développement durable, inscrite dans les gênes de la CFTC, au nom du bien commun, et de la place de l'Homme dans l'équilibre entre la nature (environnement), l'économie, le social et le sociétal. Une approche qui se concrétise par la participation de la CFTC aux différentes commissions du développement durable des Nations Unies, et par sa présence, à Johannesbourg en 2002, au sommet mondial du développement durable. Il faut ensuite insister sur les évolutions prévisibles en matière d'emploi, dans le cadre des mutations technologiques et environnementales, et sur l'importance de la formation qui en découle. Trois éclairages peuvent être mis en avant, dans les domaines de l'agriculture, du BTP, et de l'énergie. A propos du premier point, insistons sur la nécessité de moduler l'agriculture actuelle extrêmement intensive polluante et source de perte d'emploi, au bénéfice d'une agriculture innovante notamment en matière de recherche. Il est temps de dépasser le débat sur les OGM, uniquement abordé sous l'angle alimentaire ; l'introduction de ces organismes est, en effet, susceptible de déboucher sur la production de carburants, d'huiles pour moteurs, et mêmes de médicaments et sur la création de nouveaux emplois. La poursuite des recherches semble s'imposer. Concernant le BTP, il est invraisemblable que les diagnostics de performances énergétiques ne s'appliquent qu'aux nouveaux entrants dans les logements et proposé qu'ils soient généralisés, pour déboucher, à terme, sur de nouvelles normes en matière d'habitat existant, et surtout de bâtiments neuf, la norme haute qualité environnementale (HQE) devant au moins devenir obligatoire pour tous les logements nouvellement construits, que ce soit dans le domaine public ou privatif. Prenant l'exemple de lampes basse consommation, il est anormal que leur utilisation ne soit pas rendu obligatoire, ou pour le moins encouragée par une mesure fiscale. Ces simples décisions sont génératrices de lutte contre les gaz à effet de serre, bien sûr, mais aussi de dizaines de milliers d'emploi, dans le domaine industriel et l'artisanat. Dans le domaine de l'énergie, enfin, la CFTC insiste pour que l'idéologie s'efface devant les impératifs de sécurité d'approvisionnement, en France ou en Europe (et même dans le monde). Elle plaide, également, pour le développement de toutes les sources d'énergie (hydraulique, éolien, biomasse, nucléaire, charbon propre...), et pour la nécessité d'investir dans la Recherche-développement sur le stockage de CO2 doit être intensifiée, ainsi que sur l'hydrogène. On trouvera ci-après les propositions avancées au nom de la CFTC par ses représentants dans les groupes 2, 4, 5 et 6. Groupe 2 - « La Biodiversité et les Ressources naturelles »Propositions de la CFTC présentées par Claire Etineau La Biodiversité associée au développement durable permet de s'adapter aux modifications de l'environnement. Tous les acteurs de notre économie nationale et internationale doivent être responsables et impliqués dans le maintien de cette Biodiversité et de son utilisation. Indicateurs et suivi devront être mis en place pour évaluer régulièrement l'état d'avancement des actions décidées en partenariat avec les représentants du gouvernement et les membres de la commission du Grenelle de l'environnement. La notion de bien commun et de solidarité est capitale pour obtenir des résultats. Développement de l'emploi et de la formation A travers la construction d'un socle solide pour nos enfants par la Biodiversité, de nouveaux métiers émergeront : La CFTC demande au gouvernement d'accepter et d'aider financièrement la mise en place de formations par les OPCA et le suivi de la gestion prévisionnelle des emplois et compétence. La remise en état des anciens habitats par l'utilisation des matériaux d'autrefois peut être donnée en exemple. Qui à l'heure actuelle à la connaissance de l'utilisation et de la restauration des matériaux de nos ancêtres ? Conseil de développement (CDD)Instances présentes dans différents pays /régions, les conseils de développement seront consultés et seront source de propositions auprès des collectivités territoriales et autres organismes en ce qui concernent les actions concernant la Biodiversité et le développement durable. Pour cela, il est nécessaire de promouvoir leur développement car ils sont peu nombreux. La CFTC encourage leur création et est actrice dans des CDD présents. Labellisation et traçabilité socialeLes produits permettant le maintien de la biodiversité avec une traçabilité sociale porteront une étiquette avec label « Biodiversité et traçabilité sociale « .Ils seront encouragés dans leur production par des aides de l'état ou/et Européennes. Biodiversité et biocarburantsLa CFTC soutient les programmes de développement des biocarburants par l'utilisation de la biodiversité afin de contribuer à la réduction de rejet de CO2. Pollueurs et payeursUne taxe pourrait être appliquée aux acteurs qui « tueraient » la biodiversité par des actions de pollution. Libre choix du citoyenLe maintien des ressources génétiques végétales et leurs utilisations par les agriculteurs permettront de développer des variétés locales et traditionnelles et d'introduire sur le marché une gamme plus importante de produits .Le consommateur aura donc le libre choix et ces produits devront être accessibles à tous. La grande distribution devra pour cela faire un effort pour élargir la gamme de son offre. Aide à la recherche et implication du Grenelle de l'environnementLe maintien des ressources génétiques et leurs exploitations demandent un déploiement au niveau des moyens de la recherche afin de croître notamment l'effectif des thésards ainsi que les échanges entre les banques de gènes en international. Connaissance dans les écolesLa biodiversité est un thème à développer au niveau des écoles afin que l'enfant soit aussi acteur de son avenir par la construction de ce socle de vie. Groupe 4 – Adopter des modes de production et de consommation durablesPropositions présentée par Thierry Magalon, au nom de la CFTC A l'initiative de Mr Borloo, ministre d'Etat, ministre de l'Ecologie, du Développement et de l'Aménagement durables, un Grenelle de l'environnement est organisé, processus d'expression rassemblant l'ensemble des compétences (Etat, patronat, collectivités, ONG, salariés et personnes morales) de la société française pour définir les meilleurs moyens de faire face à quelques-uns des défis majeurs de notre temps comme l'effet de serre et le réchauffement de la planète, l'appauvrissement de la diversité biologique, le tarissement des énergies fossiles, la pollution généralisée et ses conséquences pour la santé de tous les êtres vivants y compris l'homme. Six groupes de travail ont été constitués dont le 4 intitulé : « adopter des modes de production et de consommation durables : agriculture, pêche, agroalimentaire, distribution, forêt et usages durables des territoires ». Un représentant de la CFTC-INRA était invité de même que la Présidente actuelle de l'INRA (Marion Guillou) et deux anciens directeurs de l'INRA (Paul Vialle et Bernard Chevassus Au Louis). Chaque représentant a fait part rapidement de ses idées et propositions, chacun s'engageant à les préciser par écrit. Le tour de table fait apparaître une multitude de positions et propositions, complémentaires souvent, inconciliables parfois. Le but du jeu étant que chaque groupe de travail puisse proposer et argumenter 3 ou 4 propositions claires, réalistes et acceptables. Nous vous présentons la lettre adressée à Jean Louis Borloo présentant les propositions de la CFTC, sans doute plus axées sur la recherche que celles des autres participants. « Mr Jean Louis Borloo,
Groupe 5 : Construire une démocratie écologique : institutions et gouvernance,Propositions présentées par Patrick Picandet au nom de la CFTC
Propositions CFTCConceptsPrôner le concept de destination universelle des biens qui limite de droit de la propriété privée aux exigences du bien commun dans l'espace et dans le temps (générations futures). Lier le progrès social et le progrès environnemental (développement intégral). InternationalCohérence en termes de lignes de conduite (Commission et Etats Membres) sur la promotion de valeurs européennes au sein du BIT, OIT, OCDE, Agences multilatérales pour l'environnement, OMS, OMC,FMI, ONU. Publication des PV des réunions du Conseil des administrateurs (Banque Mondiale – FMI) Postes de conseillers sociaux et environnementaux au sein des Ambassades. EuropeParlement Européen Extension des analyses d'impacts sur la durabilité (AID) Transparence et information entre Parlement Européen et Parlements Nationaux PIB vert (prise en compte des valeurs environnementales non marchandes au même titre que les valeurs marchandes) Pertinence du contenu du PIB. Recherches d'innovation et d'infrastructure affranchies du Pacte de stabilité National1°) Mise en œuvre d'une comptabilité de développement durable humain (Qualité de la croissance) sur 5 critères :
FormationEducation dès le primaire (formation du citoyen de demain)
InformationResponsabilité des Médias et de la Publicité GouvernanceRenforcer la gouvernance à tous les niveaux, assurer la participation de tous les acteurs et exiger la responsabilité, démocratiser les procédures de négociation
Groupe 6 - Promouvoir des modes de développement écologiques favorables à la compétitivité et à l'emploi.Proposition de la CFTC présentée par Bernard Ibal Stimuler la demande et l'offre de produits et de services durables : la traçabilité sociale et écologique. Nous reprenons ici l'un des objectifs de la FNE « la stimulation de la demande et de l'offre des produits et services durables », et, pour y parvenir, la CFTC propose la mise en place progressive d'une traçabilité sociale et écologique. Je suis déjà rapidement intervenu dans ce sens le 25 juillet 2007. Cette mesure nous paraît s'inscrire dans la problématique du groupe 6 : nouveaux modes d'organisation, modifications des comportements, compétitivité des entreprises. Mais elle peut aussi intéresser d'autres groupes si elle leur est communiquée. Quant au développement durable, la CFTC ne veut pas séparer le progrès social et le progrès environnemental car le but global est l'avenir de l'homme et son épanouissement. La CFTC parlerait volontiers de développement intégral. Beaucoup de mesures (que d'ailleurs la CFTC approuve) sont d'ordre législative ou règlementaire. C'est dire combien le marché est en soi suspect d'être un frein au progrès social et à la préservation de l'environnement. La proposition d'instaurer une traçabilité sociale et écologique des produits et services ne limite pas la liberté des marchés, elle donne une information complémentaire aux consommateurs. Les clients ont un pouvoir : prix, qualité, service après-vente. Pourquoi ont-ils peu de pouvoir sur la valeur humaniste que représentent l'élaboration et la distribution des produits et services ? Parce qu'en tant que clients, ils ignorent tout dû « contenu » social et écologique de ce qu'ils achètent. Les produits et les services mis en marché manquent de transparence sociale et écologique pour être choisis en connaissance de cause. D'où l'idée de l'étiquetage de la traçabilité sociale et écologique des produits et services. Cette démarche commence par l'évaluation, en termes de progrès social et écologique, de toute la chaîne des entreprises qui, de l'amont de la matière première et du projet à l'aval de la distribution, a permis de mettre un produit ou un service à disposition d'une clientèle « grand public ». Ensuite, l'étiquetage peut être plus ou moins détaillé et se finaliser sous forme d'icônes simples garantissant cette richesse immatérielle du produit ou du service. Cette évaluation peut se faire à partir de 6 critères précis : liberté syndicale et importance de la négociation collective, précautions environnementales, protection sociale, gestion prévisionnelle de l'emploi (sans discrimination), évolution des salaires, conditions de travail. Ces critères restent à affiner en fonction des branches d'activités concernées. S'agissant de l'implication d'entreprise du Tiers-monde, les 6 critères d'évaluation devront être « indexés » sur le niveau social moyen actuel du pays d'origine, et tenir compte des critères de l'OIT (exemple : travail des enfants). C'est pourquoi, nous pensons que l'opérateur de l'évaluation doit être une émanation intersyndicale à l'image du CIES (Comité Intersyndical de l'Epargne Salariale créé en 2002) qui labellise des produits financiers : un CIETSEPS : Comité Intersyndical de l'Evaluation de la Traçabilité Sociale et Ecologique des Produits et Services (ce Comité pourrait s'élargir à d'autres partenaires). Comme le CIES, le CIETSEPS procéderait par « discrimination positive » des produits en donnant son label (son étiquette) aux seuls produits entrant dans les critères d'évaluation. Comme pour le CIES, toutes les évaluations ne se feraient pas en un an ! Il y a là une nouvelle mission sociétale et populaire du syndicalisme. La carence des syndicats dans cette évaluation en richesses humaines des produits et services laisserait un vide ; vite occupé par des entreprises privées d'évaluation éthique des entreprises (avec toute l'ambiguïté déontologique). C'est la mission propre du syndicalisme que d'émettre un jugement critique sur la politique sociale des entreprises et d'en informer l'opinion publique et les consommateurs. C'est le but de la traçabilité sociale et écologique des produits et services. Le syndicalisme, directement concerné, ne peut pas abandonner cette revendication aux seules associations spécialisées, même si ces dernières sont indispensables. Première objection à cette traçabilité sociale : les consommateurs continueront d'acheter la meilleure qualité au prix le plus bas sans se soucier du label du CIETSEPS. C'est sans doute vrai pour la plupart car le pouvoir d'achat est généralement faible, mais les travailleurs pauvres peuvent aussi cependant donner une priorité à l'éthique. Il suffit que la traçabilité sociale motive 5 à 10 % des consommateurs pour que les entreprises concernées changent leur stratégie sociale. En fait, selon le CREDOC, 44 % des français tiendraient compte, lors de leurs achats, des engagements pris par les entreprises en matière de « citoyenneté ». D'ailleurs, le succès du commerce équitable montre l'attention d'un nombre grandissant de consommateurs à l'histoire sociale d'un produit. (Cependant, l'étiquetage social des produits est un projet plus modeste que le commerce équitable puisqu'il ne s'agit pas ici de réorganiser le marché mais seulement de le juger). Deuxième objection à cette traçabilité sociale : l'étiquetage de la valeur sociale et écologique de l'histoire d'un produit ou service ne peut provenir que de l'initiative d'un accord mondial, sinon les seuls marchés étiquetés seraient pénalisés. Non : la mesure peut être européenne, ou française ou encore plus parcellaire. En effet quelle entreprise, par exemple, peut se permettre de boycotter le marché français si le label lui est refusé ?'Elle se pénaliserait elle-même. Troisième objection à cette traçabilité sociale : ce projet est trop complexe. C'est ce que disent toujours les conservateurs. La création de la protection sociale a été encore plus complexe par son organisation et ses dépenses. La traçabilité des produits a déjà des précédents dans la traçabilité de l'origine et du contenu des produits alimentaires, dans la composition des produits chimiques, etc. Quatrième objection à cette traçabilité sociale : les marchés ne l'accepteront pas. Le problème ne se pose pas en ces termes. Il ne s'agit pas d'une revendication que tel partenaire peut refuser, ni d'une loi qu'une éventuelle majorité pourrait rejeter. Il s'agit d'une entrée libre sur un marché libre : les produits labellisés seront étiquetés ou non selon la volonté des entreprises labellisées qui les vendent et de l'organisme certificateur. Par ailleurs, le libéralisme est favorable, expressément, à toute forme de transparence des contrats et des marchés. L'originalité est là : la traçabilité sociale des produits et services est une entrée des fondamentaux écologiques et sociaux (les 6 critères) sur le marché lui-même. Jusqu'à présent, le syndicalisme oppose les fondamentaux sociaux aux lois « sauvages » du marché. Il faut évidemment persévérer. Mais, compte tenu de la mondialisation des marchés, la lutte est inégale. En revanche, l'étiquetage de la valeur humaine (et non plus seulement matérielle) d'un produit met en marché les fondamentaux sociaux : les consommateurs peuvent les acheter ou non. Les salariés consommateurs s'expriment par leurs choix et décident de l'avenir d'un produit ou service soumis à la démocratie directe des clients. Cette démocratisation sociale et environnementale des marchés par les consommateurs informés n'empêche pas, bien au contraire, que soient poursuivis les efforts de création d'une gouvernance du monde qui régulera les marchés selon des critères de justice sociale. Reste à savoir quand et comment ? Mais quelle que soit la bonne intention de cette future gouvernance mondiale, ne faut-il pas craindre que ses décisions sociales soient contournées ou détournées, comme trop souvent, par l'omnipotence des marchés ? En fait, l'une des façons pour le social et l'environnemental de ne pas être « laissé pour compte » par le marché, c'est d'entrer dans le marché. |