Points de vue sur l'actualité

La loi du 5 mars 2007 change la donne

Que se passe-t-il lorsque le juge pénal et le juge civil sont saisis des mêmes faits ? Le code de la procédure pénale dans son article 4 était clair : " le pénal tient le civil en l'état ". Autrement dit, le juge civil était dans l'obligation d'attendre la décision du juge pénal avant de rendre sa propre décision. Depuis la loi du 5 mars 2007(*), ce n'est plus le cas, sauf dans un cas. Avant cette nouvelle loi, en effet, si le tribunal pénal était déjà saisi, la victime pouvait engager une action devant la juridiction civile, mais celle-ci devait surseoir à statuer - c'est-à-dire attendre pour rendre une décision - tant que la juridiction pénale n'avait pas définitivement jugé de la culpabilité pénale. Dans tous les cas de figure, le juge civil devait attendre le dénouement de l'action exercée devant le juge pénal avant de rendre lui-même son jugement. Désormais, depuis la loi du 5 mars 2007, le pénal ne tient plus le civil en l'état, sauf dans un cas. Dans cette loi tendant à renforcer l'équilibre de la procédure pénale, le législateur a réécrit l'article 4 du code de procédure pénale en établissant une nouvelle distinction entre l'action civile en réparation du préjudice causée par l'infraction et exercée devant le juge civil, et les autres actions exercées devant la juridiction civile de quelque nature qu'elles soient. Dans le premier cas, il est sursis au jugement du juge civil tant qu'une décision définitive n'a pas été rendue sur l'action portée devant le juge répressif. Dans le second, et c'est la nouveauté, face à ces actions " à des fins civiles ", c'est-à-dire ne visant pas à la réparation d'un préjudice (contestation d'un licenciement fondé sur le vol du salarié, par exemple), le juge civil est libre de juger immédiatement ou d'attendre la décision du juge pénal (article 4 du Code de procédure pénale). En d'autres termes, le principe du pénal tenant le civil en l'état n'est plus automatique : il demeure seulement pour l'action en réparation du préjudice causé par l'infraction.

En pratique : Cette modification est importante car elle marque la fin des manœuvres dilatoires quand le demandeur cherchait à retarder le jugement de l'action devant le juge civil en déclenchant des poursuites pénales alors qu'il savait qu'elles étaient sans objet ! Il s'agissait donc par cette loi de prévenir l'instrumentalisation de la justice pénale par des dépôts de plaintes ayant comme seul objet le blocage d'une procédure civile.

Loi n° 2007-291, 5 mars 2007, art. 20, Journal Officiel ou 6 mars, modifiant l'article 4 du Code de la Procédure pénale.