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La Sécu' reconnaît le suicide comme AT

La Caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine (CPAM 92), a reconnu, le 3 mai 2007, comme accident du travail (AT) le suicide d'un ingénieur survenu le 26 octobre 2006 au Technocentre de Renault, à Guyancourt, dans les Yvelines. Une surprise puisque, dans une première décision datée du 17 janvier, elle s'était refusée à le faire. Pressée par la Caisse nationale AT-MP, la CPAM 92 a réexaminé le dossier et fini par démontrer le lien entre le geste désespéré du salarié et son activité professionnelle. Ce suicide entre dès lors dans le champ de l'article L 411-1 du Code de la Sécurité sociale définissant l'accident du travail comme un " accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail " (ce qui n'est pas le cas des suicides de deux autres salariés du Technocentre survenant après le premier). Le constructeur automobile, qui a " pris acte " de cette décision, ne fera pas appel. Carlos Ghosn, son PDG, a lui-même reconnu, le 2 mai, que " des tensions objectivement très fortes " pesaient sur les ingénieurs et techniciens, en particulier au Technocentre. Une manière d'assumer ses responsabilités en tant qu'employeur qui se doit " de garantir la sécurité et la santé physique et mentale de ses salariés et de mettre en œuvre les principes généraux de prévention des risques professionnels ", comme le prévoit l'article L. 230-2 du Code du travail " y compris les risques psychosociaux " (directive cadre européenne n°89/391). La tentation est grande de renvoyer ce type de problème hors du champ du travail en l'attribuant à une éventuelle fragilité individuelle, à des problèmes d'ordre privé ou encore à un " manque de résistance " du salarié. Un regard que la société porte souvent sur ceux que l'on juge " plus faibles ", plus enclins au stress, aux épisodes dépressifs... La tentative de suicide et la dépression nerveuse ont en effet seulement à deux reprises été reconnues comme accident du travail (Cass. Civ. 03/04/03 ; Cass. Soc. 01/07/03 et Cass. Civ. 03/04/03). Et seules une vingtaine de dépressions sévères liées au stress ont été reconnues comme maladie professionnelle en France.

C'est dit : " La CFTC est satisfaite de ta décision de la CPAM 92. Cette décision doit être aussi un espoir pour la dizaine d'autres familles en attente de reconnaissance AT pour des causes diverses liées au travail. Elle doit encourager tous les délégués syndicaux dans toutes les entreprises à mettre en place un vrai contrat de prévention sur tous les risques car la place des travailleurs dans leur exercice professionnel doit être participative et respectée ", a réagi André Hoguet, vice-président CFTC de la branche AT-MP de l'Assurance maladie le jour même de la décision de la CPAM 92.