Points de vue sur l'actualité

Vers d'autres fondements pour le dialogue social ?

Après la panne sociale due à la crise du CPE et l'atonie des négociations entre patronat et syndicats, les mois qui viennent seront-ils ceux du dialogue social et de la négociation ?

Invités par Mme Parisot à reprendre le dialogue sur quelques chantiers jugés prioritaires par le MEDEF,nous avons répondu présentstout en précisant que nous souhaitions garder toute liberté pour aller au-delà des sujets inscrits à« son »ordre du jour.

Parmi les dossiers pointéspar le Patronat, figurent en effet la remise à plat de l'assurance-chômage et le contrat de travail : Lorsqu'un salarié « péagiste » se retourne contre son employeur dans une action en justice parce qu'il a cumulé278CDD,nous disons que l'on ne peut continuer ainsi.

La CFTC ne saurait participer à une entreprise de déconstruction du contrat de travail,alors que les embauches se font déjà à plus de 70% sous forme de contrats précaires. Elle admet que les entreprises ont besoin de s'adapter en permanence à un environnement changeant. Cependant, la souplesse que réclament les entreprises ne doit pas se concrétiser par de la précarité pour les salariés.

Il s'agit donc de mettre en place cette sécurisation des parcours professionnels que propose justement notre« statut du travailleur ».

Cette réflexion aura alors nécessairement des conséquences sur le régime de l'assurance-chômage puisqu'il s'agira de repenser les transitions.

Quant à la problématique de la relation de travail, elle relève aussi du domaine dela responsabilité de l'État, garant de l' "ordre public social".

Ceci nous amène tout naturellement au deuxième grand thème de ces derniers mois :le dialogue socialqui devrait inspirer un projet de loi prochainement.

Comme toujours,ce sont nos principesqui nous guident en cette matière délicate. Les voici :

  • l'État a la responsabilité dans le domaine social de définir et assurer l'ordre public social
  • seuls les parlementaires, en tant qu'élus de la nation, sont légitimes pour légiférer
  • la loi ne peut pas tout faire et tout prévoir
  • la modernisation de la France passe par un rôle accru du dialogue social.

Garant du bien commun et soucieux de faire vivre le principe de subsidiarité,l'État se doit de ne pas faire ce que les corps intermédiaires-sauf s'ils sont défaillants-peuvent assumer en faisant mieux que lui.

À partir de là, trois types de situation peuvent se présenter :

Première situation :

Il s'agit de mesures relatives à l'ordre public social. En ce cas, la loi - par nature - s'impose. Les partenaires sociaux sont consultés en amont du vote de la loi et invités à négocier les applications de la loi.

Deuxième situation :

Il s'agit de mesures relevant du champ de compétences propre aux partenaires sociaux. La négociation est de droit, donc obligatoire : la loi n'intervient pas en amont.

Troisième situation :

Il s'agit de mesures concernant les champs partagés. La clarification des rôles est plus difficile. Il est nécessaire alors de préserver la pleine capacité d'initiative des partenaires sociaux et l'équilibre des accords auxquels ils ont pu parvenir, sans transformer le Parlement en chambre d'enregistrement.

Enfin, si l'initiative est parlementaire ou gouvernementale, un temps doit pouvoir être réservé à la négociation des partenaires sociaux.

En cas de désaccord non résolu entre partenaires sociaux et pouvoirs publics, c'est la décision des élus de la Nation qui s'impose.

Nul doute que derrière ces sujets,de nombreuses arrière-pensées persistent, sur la légitimité des accords et la représentativité syndicale par exemple.

Là encore, la CFTC, forte de sa longue expérience de la démocratie, affirmera les principes sur lesquels elle se fonde pour débusquer les pièges et éclairer les vrais enjeux.

Jacques Voisin, président.