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Points de vue sur l'actualité
CPE : Toujours plus loin dans la précarité !
«CDD d'un jour renouvelable 730 fois »
La CFTC demande le retrait du CPE. Aujourd'hui, le Premier ministre a fait passer en force, grâce au 49.3, une mesure que la CFTC juge comme une étape supplémentaire et pernicieuse dans le démantèlement du code du Travail.
Le CPE a les mêmes particularités qu'un CNE (contrat avec période de consolidation de deux ans pendant laquelle le salarié peut être licencié du jour au lendemain sans motif) mais concerne les jeunes de moins de 26 ans, et les entreprises plus de 20 salariés (alors que le CNE s'adresse à tous, dans les TPE de 20 salariés au plus). Dans les deux cas (CNE et CPE), un préavis est certes prévu: de 2 semaines lorsque le contrat est rompu pendant les 6 premiers mois et 1 mois au-delà.
Le CPE reprend tous les inconvénients du CNE liés aux caractéristiques de la rupture :
- absence pendant les deux années d'entretien préalable en cas de licenciement ;
- absence d'obligation d'énoncer dans la lettre de notification du licenciement les motifs de la rupture (sauf procédure disciplinaire) ;
- limitation du contrôle juridictionnel sur la rupture de ces contrats en raison de l'absence de motivation du licenciement.
Une différence toutefois : sont déduits de la période de consolidation de deux ans, stages, CDD, intérims, alternance, effectués dans la même entreprise avant le CPE. Toutefois, il n'est pas précisé s'il doit s'agir de périodes consécutives, ou si, lorsqu'on a déjà fait deux ans de stages, d'intérim, etc., on n'a plus droit à un CPE.
Le CPE ouvre un droit aux allocations chômage : si le salarié ne remplit pas les conditions d'ouverture de « droit commun » alors il peut bénéficier d'une allocation chômage forfaitaire de 460 euros pendant 2 mois (1 mois d'allocation représentant 492 euros si CNE)., s'il a effectué au moins 4 mois en CPE.
Les fausses idées - utilisées par le gouvernement - qui maquillent le côté néfaste du CPE :
« C'est une aubaine pour nos jeunes qui auront ainsi une expérience à faire valoir sur leurs CV » ou « cela permet une plus grande liberté pour les jeunes qui peuvent ainsi multiplier leurs expériences »
NON : c'est une bonne chose pour les employeurs, et réductrice pour les salariés !
- C'est essentiellement une bonne chose pour l'entreprise qui peut ainsi gérer sa masse salariale comme elle l'entend, sans plus aucun contrôle. Car il faut bien voir que le terme « première embauche » ne s'applique pas à la personne, qui ferait son premier contrat et qui ensuite lors de sa deuxième embauche, pourrait avoir un autre contrat. Ce terme s'adresse mais bel et bien à l'entreprise ! Explication : l'entreprise peut embaucher une première fois, une personne. Si elle décide de s'en séparer, elle pourra refaire appel à elle, au bout d'un délai de carence de 3 mois. Par contre, il n'y a aucune carence pour l'employeur qui décide d'embaucher un autre salarié, sur le même poste avec un autre CPE et ainsi de suite.
- Exemple : Le jeune qui commence à 19 ans à travailler, peut enchaîner les CPE dans différentes entreprises jusqu'à ses 26 ans, puisque le compteur revient à zéro lorsqu'il y a interruption du CPE avant les deux ans. Le CPE est donc un contrat qui peut malheureusement se perpétuer : « contrat première embauche » pour l'entreprise mais « contrats plusieurs emplois de courte durée » pour le jeune. Pire : cette situation de totale précarité, peut se prolonger indéfiniment au-delà même de ses 26 ans puisqu'il peut ensuite être embauché en CNE dans l'entreprise dont l'effectif est au plus égal à 20 salariés.
- Les directions des ressources humaines témoignent de l'intérêt qu'elles apportent à un CV où transparaît la stabilité, via des missions de longue durée. Les recruteurs recherchent souvent l'expérience, celui qui a pu mener à bien une mission ou qui est resté suffisamment longtemps dans une entreprise pour pouvoir en connaître les rouages. Un jeune qui aura fait plusieurs missions de quelques mois sera-t-il pour autant « crédible », selon les termes des recruteurs ? Aura-t-il eu le temps d'être formé, de comprendre le fonctionnement d'une entreprise ou même de développer ses compétences et ainsi de s'améliorer ?
- Quel jeune aujourd'hui a le choix entre plusieurs métiers et conserve ainsi son libre-arbitre ? Dans le CPE, tout comme le CNE, l'humain est jetable et utilisé, sans qu'il ait un autre choix que celui de subir.
« le CPE est le projet le plus social jamais proposé aux jeunes » et « Le chômage est la première précarité, pas le CPE ! »
NON c'est un accroissement de la précarité !
- Si le chômage est la première précarité, le CPE en constitue la seconde. Doit-on vraiment s'attarder à définir quelle est la pire précarité au lieu de s'attaquer vraiment à celle-ci ? On ne peut pas lutter contre la précarité en créant un contrat de précarité absolue ! Cette mesure, contenue dans une loi pour l'égalité des chances !, s'applique, non à lutter contre la précarité, mais à créer un dispositif qui va lui permettre de s'épanouir en toute légalité. Quels effets sur l'emploi peut-on véritablement escompter de ce dispositif dans la mesure où même si on considère que les entreprises embaucheront plus facilement, elles licencieront également plus facilement ?
- Un contrat social doit prendre en compte toutes les difficultés de la société, du contexte, en privilégiant la personne et son avenir. Or ce contrat nie certains droits fondamentaux, reconnus par les conventions internationales (cf point p 5).
- Alors que les pays dit « en voie de développement » luttent pour asseoir et promouvoir les droits fondamentaux chez eux, et que nous-même allons souvent leur faire des leçons de morale, chez nous, on les défait un à un… Qui finalement est le plus « développé » ? Assisterons-nous sans mot dire à une régression du droit social ?
- Le CPE, tout comme le CNE, est pire que l'intérim et le CDD que l'on considérait il y a peu comme la précarité, puisqu'ils impliquaient une insécurité sur l'avenir. Mais le gouvernement a trouvé pire : le CPE (et son frère jumeau le CNE). A côté, les contrats à durée déterminés dans leur ensemble feraient presque figure de contrats « quatre étoiles ». Ils imposaient, en effet, le versement d'une prime de précarité en cas de rupture. On la retrouve également pour les CNE / CPE mais elle est de 8 %, alors que le droit commun pour les CDD et Intérim est de 10 %. Ce qui signifie que les CNE et CPE sont plus précaires). De plus, les CDD et les missions d'intérims fixaient des dates précises de début et de fin. Le salarié était assuré d'avoir un emploi et un salaire sur une période limitée et pouvait ainsi se projeter et prévoir. En outre, le CDD et le Contrat en travail temporaire sont strictement encadrés, avec, notamment une liste limitative de motifs de recours et la garantie pour le salarié, en cas de violation de la réglementation, de réclamer directement devant le bureau de jugement du Conseil des Prud'hommes, la requalification de son CDD en CDI. Finalement, un intérimaire est moins précaire qu'une personne en CPE !
« Le CNE est un succès puisqu'il y a des embauches : donc le CPE suivra la même voie ! »
NON c'est de la communication !
Les experts estiment qu'on ne saura évaluer si le CNE et le CPE se révèlent créateurs d'emplois, dans deux ans !
On constate une substitution du CNE au CDD, plus contraignant pour l'employeur. Les premières études montrent que le recrutement aurait été fait de toute façon, mais sous forme d'un autre contrat.
« Seuls les jeunes sont concernés »
NON : le CNE - CPE n'est qu'une étape vers la généralisation de contrats précaires et la suppression de contrats à durées indéterminés, voire déterminés.
Et Non : il existe son frère jumeau pour toutes les catégories d'âge confondues : le CNE (simplement il doit s'agir d'une entreprise de moins de 20 salariés).
Il est important que chaque salarié voit à moyen terme et discerne ce qui se trame derrière. Le CPE, comme le CNE, n'est qu'une étape vers le contrat unique, qu'évoque de plus en plus le Premier ministre et auquel le patronat aspire. A terme, ce genre de contrat concernerait tout le monde !
C'est donc une attaque en règle et une déconstruction du Code du travail, qui rappelons-le, a été créé en 1910 pour remettre à niveau le rapport par essence inégalitaire entre employeurs/ employés.
Vous avez un CDI ? Félicitations ! Mais un conseil : anticipez votre futur CNE ou CPE, voir contrat unique reprenant cette période de consolidation de deux ans en cas d'accident de parcours professionnel.
« Ce contrat va relancer la croissance » et « Ça va créer de l'emploi »
NON : les conséquences en terme de gestion des précaires seront catastrophiques pour la croissance.
Aucun économiste sérieux ne fait de lien entre flexibilité et développement de l'emploi. La CFTC attend du gouvernement qu'il relance la croissance, qu'elle estime comme seule source de création d'emplois. C'est pourquoi elle conteste la finalité du CPE : normalement un nouveau contrat doit améliorer une situation. Or pour la CFTc, seule la croissance économique est créatrice d'emplois, et pas la multiplication des contrats. Seule une véritable politique salariale sera efficace, avec relance des investissements et de la consommation.
Pour info : selon une enquête parmi les adhérents du CJD (jeunes dirigeants), les entreprises concernées "ne se ruent pas sur le CNE, loin de là", avec seulement "deux emplois sur cinq créés" avec ce type de contrat.
« CPE : mieux que rien ! »
NON : c'est pire que tout ! Le CDI reste la solution.
Le rapport Proglio, remis le 15 février à Gérard Larcher, prouve que le CDI est la forme la plus propice à l'épanouissement du jeune, et à son établissement dans la vie active et donc dans la société. Par le CDI, la croissance peut revenir. Avec le CPE, elle va se faire attendre.
Est-ce le meilleur que l'on puisse proposer à des jeunes, alors que des études montrent que 1/3 d'entre eux notamment sont recrutés en CDI dès le premier job. Ces CDI seront malheureusement remplacés par des CPE.
« le CPE respecte les droit du travail dont ceux de la formation, notamment le DIF. »
NON : parce que ces droits seront au prorata du contrat
Certes le droit au DIF est assuré pour un minimum d'un mois d'activité (alors qu'il faut un an d'ancienneté en principe pour avoir 20 heures par an). Admettant qu'un jeune travaille trois mois, il aura cinq heures de DIF. Est-ce suffisant pour se perfectionner ?
« La chance d'avoir des droits « chômage » ouverts »
NON : parce que le montant est ridicule et ne permettra à personne de vivre dignement !
Les montants des allocations de chômage prévus en cas de rupture à partir du 4ème mois et avant le 6ème mois sont extrêmement faibles et représentent une somme forfaitaire, contrairement à l'allocation de chômage « classique », allouée à partir de 6 mois d'affiliation, qui est calculée par rapport au salaire effectivement perçu. Il s'agit donc d'une allocation forfaitaire journalière aux alentours de 16 euros, sachant, à titre de comparaison, qu'un salarié payé au Smic perçoit environ 25 euros d'allocation de chômage dans le régime de droit commun.
Dans le cas d'une rupture après le 6ème mois, la personne rentrera dans la filière classique.
En 2009, le cas d'un jeune heureux qui remercie M. Villepin :
Joachim, 24 ans, ayant commencé à travailler voilà 3 ans, 5 CPE (un de trois mois, un d'un mois, un de un an et demi, un de deux mois puis le dernier depuis quatre mois). Lors du troisième CPE, il a pu bénéficier des Assedic soit 700 euros… Il vivait toujours chez ses parents puisqu'il ne pouvait pas louer : « trop instable », lui rétorquaient les propriétaires. Pourtant, un a bien voulu lui donner sa chance lorsqu'il a pu justifier de plus de trois mois de salaire : il a pris un appart à 500 euros par mois, en empruntant 1 500 euros pour la caution. Lorsque son CPE a été rompu, il n'a plus pu payer son loyer. Il est retourné chez ses parents. Aujourd'hui, il espère que son CPE va aboutir en CDI. Sinon, il se retournera vers l'intérim, même s'il sait que peu d'employeur y font encore appel. Ah oui, à un moment, en 2006 il se souvient avoir été content que le gouvernement pense à lui en instaurant le CPE, et ses parents eux même pensaient : « ce sera toujours une expérience ! » Expérience de la galère ?
Parents, jeunes, citoyens : ce qu'il faut savoir sur le CPE
La contestation / le recours
Ce type de contrat nie un droit fondamental de la personne : le droit de contester et d'avoir recours. Le droit d'être défendu. Il faut réaliser qu'une personne peut enchaîner des CNE toute sa vie et donc être hors du droit toute sa vie !
Hormis cette négation du droit (cf ci-dessous le point sur « la France hors-la-loi »), le problème est que les réclamations vont aller sur le terrain de la discrimination et de l'abus de droit. Autrement dit, on va détourner des procédures existantes afin de contourner l'absence de motivation du licenciement. Ce contrat va aussi dans le sens d'un processus en cours : on assiste déjà la systématisation des licenciements pour motifs personnels : en 2004, le taux de recours devant les conseils des prud'hommes est de 25,8 % pour les licenciements « de personne » (2,5 % pour les licenciements économiques). La DARES, dans l'étude « Les nouveaux usages du licenciement pour motif personnel », en juillet 2003, estimait déjà que les licenciements pour motif personnel devenaient « l'un des moyens de réduire ou de recomposer la main d'œuvre dans le cadre des restructurations ». Parce qu'ils apparaissent moins risqués aux employeurs et parce que « moins visibles », ils permettent de mieux préserver « l'image de l'entreprise » et seraient relativement plus « indolores » pour le corps social. Le CPE ne va faire que permettre la discrimination légale !
De plus, le délai de contestation qui était auparavant de 5 ans (pour des demandes de salariales) et de 30 ans (pour des demandes indemnitaires) est arbitrairement réduit à 1 an. Il y a donc une volonté politique d'écarter tout droit du salarié, qu'il oit en fonction ou une fois que la rupture ait été consommée.
Il subsiste maintes incertitudes et zones d'ombres dans cette loi, élaborée dans la précipitation sans penser aux conséquences juridiques et sans réfléchir aux principes existants risquant d'aboutir à de nombreuses contradictions et donc à une incertitude juridique tant côté salarial que patronal.
La France se met hors la loi et est seule au monde à mettre en place cette mesure illégale
Ces contrats sont contraires aux droits internationaux, notamment à la convention de l'Organisation internationale du travail (OIT) :
- Art 7 : « impose une procédure contradictoire »
- Art. 4 : « Pas de licenciement sans motif valable »
Et la norme nationale ne prévaut pas sur l'internationale.
De plus, cette mesure depuis est un fait unique en Europe. Elle a été appliquée en Grande-Bretagne et y a démontré son incapacité à produire de l'emploi. Cette mesure a donc été retirée.
Les points sur les stagiaires
Le 49.3 a bloqué de fait les négociations intéressantes qui étaient contenue dans la loi. Or la CFTC se prononce pour une reconnaissance des stagiaires et de leur expérience à ce moment. Et elle tient à ce que cette période soit rémunérée décemment.
Une mesure despotique et arbitraire car elle rompt le dialogue social
Nous contestons le fait que ce contrat soit passé à la hussarde par un gouvernement qui avait déclaré qu'il attendrait l'évaluation du CNE pour l'étendre. Force est de constater qu'il a menti. Cela devient malheureusement une habitude de passer outre la concertation : le CNE a été établi par ordonnance en plein dans les vacances d'été (août).
Rappelons que la Loi Fillon impose une concertation avec les partenaires sociaux sur chaque projet de loi ayant un impact social.
De plus, le gouvernement n'hésite pas à jouer sur les mots : CPE/CNE sont présentés comme des CDI ! alors que l'ensemble des arguments démontrent qu'au contraire, durant les 2 premières années, ce contrat est plus précaire que les CDD ou Intérim.
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