Points de vue sur l'actualité

Sauvegarde de la compétitivité : de l'élargissement à la dérive

Par plusieurs arrêts du 11 janvier dernier, la chambre sociale de la Cour de cassation a admis que la sauvegarde de la compétitivité de l'entreprise puisse constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement économique. Au-delà même du débat doctrinal, qui cherche à déterminer si cet arrêt constitue une modification significative de la jurisprudence ou s'il est un simple prolongement de l'arrêt Vidéocolor de 1995 consacrant la sauvegarde de la compétitivité, il convient d'analyser cette notion. Le jugement de la Cour de cassation repose sur un équilibre entre les garanties liées au droit du travail et celles relatives à la liberté de gestion d'un chef d'entreprise. Les juges considèrent que, en l'absence de difficultés économiques immédiates, mais dans le but d'éviter des difficultés prévisibles et leur conséquences néfastes sur l'emploi, un employeur peut valablement réorganiser son entreprise et mettre en place un plan de sauvegarde pour l'emploi. Les licenciements qui en découlent reposent, donc, selon eux sur un motif réel et sérieux. Se pose, dès lors, une série de questions. Au nom de la faculté d'anticiper, doit-on tout accepter et aller encore plus loin dans la possibilité de mettre un Plan de sauvegarde de l'emploi (PSE) dans une entreprise qui ne rencontre pas de difficultés économiques immédiates ? En élargissant la notion de sauvegarde de la compétitivité, ne risque-t-on pas, demain de voir la Cour de cassation glisser de la notion de sauvegarde de la compétitivité et à celle d'amélioration de la compétitivité pour justifier un plan social ?