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La résiliation judiciaire et la rupture par anticipation du contrat de travail

La résiliation judiciaire du contrat de travail qui peut être demandée par un salarié ou un employeur, en cas d'inexécution des obligations de l'un ou de l'autre, constitue un mode de rupture du contrat de travail. Selon la jurisprudence, la résiliation, lorsqu'elle est prononcée à l'initiative du salarié et aux torts de l'employeur, produit les effets d'un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse (Cass. Soc, 20 janvier 1998).

L'action en résolution judiciaire laisse, en principe, subsister la relation contractuelle pendant le déroulement de l'instance. Toutefois, la décision de justice qui résilie le contrat de travail, rompt immédiatement celui-ci : ainsi, le salarié ne saurait revendiquer une prolongation des relations contractuelles en demandant l'exécution du préavis ou le paiement de l'indemnité compensatrice de préavis (CA Paris 22ème ch. A, 2 juillet 1990).

Cependant, le salarié peut considérer que les manquements de l'employeur sont tels qu'il ne souhaite pas attendre la décision de justice pour interrompre son activité. Dans ce cas, il prend acte de la rupture du contrat de travail du fait de l'employeur et saisit le Conseil des prud'hommes. Le juge contrôle alors a posteriori si les manquements invoqués justifient la rupture de fait (Cass. Soc, 3 avril 1979). Un récent arrêt de la Cour de cassation est venu confirmer la possibilité pour le salarié de rompre le contrat de travail dans une affaire de tabagisme : "si l'employeur ne prend pas les mesures nécessaires au respect de la loi Evin, les salariés non fumeurs peuvent prendre acte de la rupture de leur contrat de travail, à ses torts" (Cass. Soc, 29 juin 2005).

Si le salarié peut rompre par anticipation le contrat de travail, il doit néanmoins effectuer son préavis car cette rupture ne préjuge pas de ce que les tribunaux décideront. Dans l'hypothèse où le salarié n'a pas effectué son préavis, alors que les juges n'ont pas constaté de faute de l'employeur dans l'exécution de ses obligations, l'employeur pourra demander des dommages intérêts pour rupture abusive du contrat de travail. Il aura à établir l'existence d'un préjudice (Cass. Soc, 21 mars 1979).

Si l'employeur souhaite saisir les juges en vue d'une résiliation judiciaire du contrat, il n'est plus recevable à le faire dès lors qu'il a procédé au licenciement du salarié (Cass. Soc, 29 juin 2005).