Points de vue sur l'actualité

Poursuivre la construction européenne coûte que coûte

A l'heure où le Royaume-Uni prend la présidence tournante de l'Union européenne, la CFTC tient à saluer le travail réalisé au cours des six derniers mois par la présidence luxembourgeoise et plus particulièrement Jean-Claude Junker. Le Premier ministre du Grand-Duché a dû tenter de concilier l'inconciliable. Dans la gestion du dossier très controversé du pacte de stabilité, par exemple, il a manifesté une grande intelligence politique, en déclarant qu'il veillera à " une application judicieuse de ce pacte qui, désormais, tiendra mieux compte de ses deux dimensions : stabilité et croissance. "

Contre vents et marées, malgré les divergences de points de vue sur le budget 2007-2013, Jean-Claude Junker a affiché sa volonté de poursuivre la construction européenne. Malgré une commission européenne composée d'ultra-libéraux, il a été en contact régulier avec les organisations syndicales européennes, les rencontrant à plusieurs reprises. Enfin, la CFTC salue le courage politique du Premier ministre luxembourgeois qui maintient le référendum laissant, ainsi, à son pays le choix de se prononcer sur la ratification du traité constitutionnel alors que d'autres y ont renoncé. Le pragmatisme, dont il a fait preuve, est à l'image de celui des pères fondateurs de l'Europe qui n'ont jamais forcé la main des Etats mais ont toujours su temporiser.

La CFTC aimerait que la présidence britannique soit animée de la même volonté. Elle rappelle que le modèle anglais de lutte contre le chômage, tant vanté pour sa " réussite " outre-Manche et que certains voudraient étendre à l'ensemble de l'Union européenne, est le résultat d'une manipulation des chiffres qui cache la réalité du chômage Outre-Manche. En l'espace de vingt ans, le nombre d'handicapés est passé de 570 000 à 2,8 millions (source FMI, OCDE, Eurostat). Ces personnes, qui perçoivent une allocation d'incapacité et qui sont allés gonfler les rangs des exclus, ont ainsi été rayées du nombre des chômeurs. La CFTC s'associe au mémorandum syndical adressé par la Confédération européenne des syndicats (CES) qui dresse la liste des principales priorités pour la présidence britannique de l'Union européenne. Ce mémorandum constate que le gouvernement britannique s'est souvent opposé à l'Europe sociale et joue un rôle de premier plan dans le blocage d'importantes mesures législatives européennes en matière sociale. La CFTC, avec la CES, invite par conséquent la présidence britannique à lancer un vaste débat sur le modèle social européen et notamment à : faire avancer la révision de la directive sur le temps de travail, afin d'en finir avec la disposition prévoyant la possibilité de dérogation (dite " opt-out ") ; rechercher un compromis afin de débloquer le projet de directive sur les travailleurs intérimaires ; refondre la directive sur les services pour supprimer l'importance déséquilibrée qu'elle accorde au principe du pays d'origine ; faire avancer des questions importantes comme la réglementation Reach en matière de substances chimiques ainsi que l'égalité entre les hommes et les femmes dans tous les domaines de la détermination des politiques. La CFTC, comme la CES, demandent que soient menées des actions urgentes pour répondre concrètement aux exigences des travailleurs, pour renforcer, dans ce sens, le projet européen et pour poursuivre l'élargissement de l'Europe à la Roumanie et à la Bulgarie. Enfin, à l'heure où Monsieur Seillière accède à la présidence de l'Unice, la CFTC insiste sur la nécessité de relancer le dialogue social européen ; elle demande au patronat privé européen d'assumer son rôle de partenaire social et de rompre avec sa stratégie de lobbying qui a largement contribué au résultat du 29 mai en France.