Points de vue sur l'actualité

Le pouvoir d'investigation de l'employeur limité

Les conditions permettant à un employeur de consulter les fichiers personnels d'un salarié, stockés sur l'ordinateur mis à sa disposition pour sa profession, ont été posées de façon précise dans un arrêt de principe de la Chambre sociale de la Cour de cassation du 17 mai 2005. En l'espèce, l'employeur avait procédé à l'ouverture de fichiers personnels du salarié, à la suite de la découverte de photos érotiques dans un tiroir de son bureau. Des dossiers étrangers aux fonctions du salarié avaient été trouvés et celui-ci avait été licencié pour faute grave.

La problématique était donc la suivante : la découverte des photos érotiques dans le tiroir du salarié justifiait-elle, en son absence, le contrôle de ses fichiers personnels présents sur son ordinateur ?

Pour l'employeur, cette découverte constituait une circonstance exceptionnelle l'autorisant à contrôler le contenu du disque dur qui n'était, par ailleurs, protégé par aucun code personnel. Pour le salarié, il s'agissait au contraire d'une violation de sa vie privée qui implique, entre autres, le secret des correspondances.

Les magistrats ont estimé pour leur part que "sauf risque ou événement particulier, l'employeur ne peut ouvrir les fichiers identifiés par le salarié comme personnels, contenus sur le disque dur de l'ordinateur mis à sa disposition, qu'en présence de ce dernier ou celui-ci dûment appelé." En l'occurrence, l'intéressé était absent lors de cette ouverture et celle-ci n'était justifiée par aucun risque ou événement particulier.

Autrement dit, le contrôle opéré par l'employeur étant illicite sur la forme, les preuves glanées lors de ce contrôle l'étaient donc par voie de conséquence. Le licenciement du salarié fondé sur ces preuves devenait donc abusif.

La solution donnée par la Haute cour, à savoir la présence du salarié, n'est toutefois pas surprenante car elle a déjà été imposée pour l'ouverture d'armoires individuelles. De plus, depuis l'arrêt "Néocel" du 20 novembre 1991, les magistrats exigent loyauté et transparence de l'employeur dans la mise en œuvre de procédés de surveillance. L'employeur conserve donc un pouvoir d'investigation envers ses salariés, mais strictement encadré par la jurisprudence.