Points de vue sur l'actualité

Justice : un avocat trop syndiqué

Le monde de la justice ne ferait-il pas bon ménage avec le syndicalisme ? L'affaire d'un jeune avocat mis à pied pour adhésion syndicale pourrait en être une illustration. Avi Bitton s'est mis à dos Clifford Chance, le "plus grand cabinet d'avocats du monde", en prenant sa carte à la CFTC. Embauché en novembre 2003 au bureau français de ce cabinet international, qui est un des seuls à employer des avocats salariés en France, il exerce correctement son activité professionnelle, et mène parallèlement une activité associative et syndicale que personne ne lui reproche. En novembre 2004, il est convoqué pour un entretien. D'après le compte rendu officiel, Avi Bitton doit corriger ses "défauts." En clair, il doit cesser ses activités associatives et syndicales. Une semaine plus tard, il se fait désigner délégué syndical CFTC et représentant auprès du comité d'entreprise. Clifford Chance dépose un recours devant le tribunal d'instance pour annuler la désignation. Motif : se sentant menacé de licenciement, Avi Bitton aurait cherché à se protéger. Le tribunal tranche en faveur du cabinet. Comme le recours ne mentionnait que le statut de délégué syndical, Avi Bitton reste donc représentant syndical auprès du CE. D'où un passage obligatoire par la case inspection du travail pour un licenciement. Le 25 mars, celle-ci refuse le licenciement, soulignant que tout lien entre la demande de licenciement et le mandat du salarié ne peut être écarté. "Avi Bitton a réintégré son poste, qu'on a entre-temps transformé en... placard !, témoigne Patrick Le Moigne, SG du syndicat national CFTC des professions judiciaires et juridiques. Il attend le résultat de son pourvoi en cassation, qui peut tomber dans un an, et continue la défense de ses collègues."