Points de vue sur l'actualité

Perdant-Perdant

Le langage managérial comporte quelques surprises. Il est courant d'entendre le dogme du donnant-donnant ou gagnant-gagnant lors de négociations sociales. Ce qui laisse envisager des dogmes perdant-gagnant ou perdant-perdant. Le dogme donnant-donnant est-il transposable du domaine commercial au domaine social ?

S'il est possible d'admettre que, si en réduisant ma marge sur un produit, ceci me permettra d'en vendre plus. Par contre, transposer ce dogme au principe, souvent évoqué, pour mieux payer les fonctionnaires il en faut moins, pose problème. D'abord, les fonctionnaires ne sont pas des marchandises, ensuite ils exercent des missions qui de toutes façons devront être exécutées. Enfin, où est l'économie ? Puisque le nombre est inférieur mais le montant de la charge identique. On peut d'ailleurs retourner la problématique en indiquant que dans certains secteurs il faudrait plus de fonctionnaires et donc moins bien les rémunérer afin d'éviter une augmentation de la charge financière.

La question principale est : quel doit être le périmètre d'intervention de l'Etat et des collectivités ? La France de 2005 n'est plus celle de 1945. Les secteurs où l'intervention de l'Etat est une nécessité ne sont plus les mêmes. Mais les principes républicains d'organisation de notre pays qui assurent sa cohésion sont toujours les mêmes. Dans ce domaine, le donnant-donnant commercial est illusoire.

Ainsi il faudra aider telle collectivité territoriale, telle entreprise, tel secteur d'activité, tel groupe social. On est dans le domaine du « je te donne pour t'aider à exister » et non dans celui du donnant-donnant.

Si l'on transpose ce principe aux négociations salariales, comment mettre en œuvre un donnant-donnant quand l'évolution de la rémunération est inférieure à l'évolution de l'indice des prix ? La première étape est le maintien du pouvoir d'achat des personnes en place. Ce n'est pas du donnant-donnant. Ensuite, il est évident qu'il faut moderniser l'organisation des carrières, car la fonction publique a changé, son périmètre d'intervention évolue, la sociologie de son personnel évolue.

La CFTC ne conteste pas la nécessité de faire évoluer divers paramètres. Mais, avant d'aborder la question des effectifs, il faut s'interroger sur la place de la fonction publique dans le respect des principes républicains qui gouverne notre pays, ce n'est pas un langage commercial. Ensuite, il ne faut pas rechercher une rentabilité hypothétique qui est un langage purement commercial, mais rechercher l'efficience, ou comment utiliser au mieux de l'intérêt de nos concitoyens les ressources qu'ils donnent à la communauté nationale par le biais de l'impôt.

Les adeptes du donnant-donnant, surtout quand il s'agit d'élus du Peuple, seraient bien avisés d'avoir plus le sens du Bien commun et ne plus considérer la République et les personnes qui la composent comme des marchandises.