Points de vue sur l'actualité

Toujours les mêmes qui paient

Sur les 2,8 milliards de travailleurs dans le monde en 2003, 1,4 milliard gagnaient moins de deux dollars par jour, et quelque 550 millions, moins d'un. Dans son "rapport sur l'emploi dans le monde 2004-2005", publié le 7 décembre, le Bureau international du travail (BIT) rappelle donc que la planète n'a jamais autant compté de travailleurs, et qu'un sur deux vit en dessous du seuil de pauvreté. Sa principale piste pour réduire ces chiffres inadmissibles : accroître la productivité. En parallèle, l'organisation, créée en 1919, reconnaît que les emplois créés doivent être "décents." Pour la CFTC, "la productivité n'est pas synonyme d'évolution sociale, assure Michel Coquillion. Seules une prise en compte des droits économiques et sociaux, ainsi qu'une meilleure répartition de la richesse, peuvent être parmi les moyens efficaces à long terme. Les anciens pays communistes, dont l'Ukraine, qui ont opté pour la dérégulation, sont un exemple parfait : les riches, qui détiennent le pouvoir politique, sont de plus en plus riches et les pauvres, de plus en plus pauvres. Les gains de productivité obtenus par la baisse des salaires conduisent à une nouvelle forme de pauvreté désespérante et de plus en plus répandue : les "working poors." Et puis, reste à prouver qu'on crée plus d'emplois qu'on en détruit par ce biais. Prenons l'exemple des grands groupes français qui se sont repliés sur leurs activités les plus juteuses et les plus productives, pour se faire ensuite absorber, entraînant d'importantes suppressions d'emploi. La CFTC reste convaincue que jamais le business n'a créé de régulations sociales. Celles-ci ne peuvent se créer que par une volonté politique forte ou une mobilisation légitime des victimes du libéralisme inhumain."