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Le rapport Canivet, caution à l'ultra-libéralisme, danger pour les salariés

Le Premier ministre Jean-Pierre Raffarin a proposé une réforme de la loi Galland, qui régit les relations entre fournisseurs et grande distribution, "à condition qu'elle protège les consommateurs, les PME et le petit commerce" a-t-il indiqué. La Commission, présidée par Guy Canivet, président de la Cour de Cassation, préconise dans son rapport remis à Bercy le 18 octobre dernier, l'élimination du mécanisme de la loi Galland. Celle-ci empêche depuis 1996 toute concurrence sur les prix entre distributeurs et grandes marques (Leclerc, Carrefour, Casino, Attac, Auchan...), leur assurant des marges confortables. Mais elle limite ainsi l'accès aux produits des PME et des producteurs agricoles. Le rapport, largement approuvé par Nicolas Sarkozy, recommande donc de ramener le seuil de revente à perte au niveau des prix dit "triple net", c'est-à-dire le net de ristourne, le net de rabais et le net de marges arrière. Ce qui signifierait pour les distributeurs, de pouvoir répercuter la totalité de leurs marges dans des baisses de prix aux consommateurs, autrement dit de vendre sans intermédiaires, donc d'assurer une distribution plus directe du producteur au consommateur. Car il leur est impossible aujourd'hui de revendre des produits en dessous du prix d'achat au fournisseur. Si le Medef est satisfait, l'UPA est mécontente et les distributeurs sont prudents. Pour Patrick Ertz, président de la Fédération CFTC Commerce Services Forces de Vente, "cette réforme pourrait relancer une guerre des prix, avec, au bout du compte, des incidences sociales inquiétantes. Les salariés de la distribution et ceux de l'agro-alimentaire ne vont-ils pas faire les frais de la concurrence acharnée entre distributeurs ?" La réforme ne se soucie pas non plus de l'aménagement du territoire. "Chaque implantation d'un centre Leclerc", explique Patrick ERTZ, "signifie aux alentours la désertification des emplois ; et à l'intérieur de l'entreprise, c'est l'absence de politique sociale avec un fort turnover et des salariés qui craquent".